jeudi 21 mai 2015

Revoir la question des procurations au Parlement




Malgré les achats de procurations, Adrien Houngbedji a été élu au perchoir


L’élection du nouveau bureau de l’Assemblée nationale, dans la nuit du mardi 19 au mercredi 20 mai 2015, a révélé un phénomène dangereux qui discrédite la classe politique béninoise auprès des populations à la base. Il s’agit de l’usage pernicieux des procurations. 

A l’issue des urnes, les Forces Cauris pour un Bénin Emergent n’avaient obtenu que 33 députés contre 50 pour les autres forces politiques. Mais  les jours suivant la proclamation des résultats, des révélations ont fait état d’achats de députés par le moyen des procurations. Des députés ayant battu campagne contre le camp FCBE, notamment contre son projet de révision « forcée » de la Constitution n’étaient pas attendus pour accorder un quelconque soutien à cette famille politique acquise à la cause du chef de l’Etat. Mais de 33, l’effectif de cette famille politique,  par le jeu des procurations, est monté à 41. C’est du moins ce qu’a révélé l’élection du président de l’Assemblée. Le score en dit suffisamment long sur la profondeur du mal. Houngbédji n’a pu battre son challenger Koutché qu’avec les suffrages de 42 députés au lieu de 50 pressentis contre 41. On se rend, alors, compte que huit députés n’ont pas respecté le choix des populations qui leur ont donné mandat de les représenter au Parlement. C’est pourquoi d’aucuns auraient peut-être raison de les appeler des « traîtres ».  Les députés élus sont-ils libres de disposer du mandat reçu du peuple à leur guise ? La question mérite qu’on s’y penche et pose le problème de la nécessité d’une certaine éthique dans l’arène politique.
Cette éthique s’impose pour contraindre les parlementaires à respecter le choix des populations à la base et à ne pas s’en écarter durant la mandature. A défaut, ils continueront de se prendre pour des propriétaires incontestés et légitimes des suffrages obtenus auprès des électeurs à la base. Pourtant, le peuple est dit souverain. Cela pose le problème de la prévalence d’une conscience morale en politique. Sans abroger l’utilisation des procurations, sa mise en œuvre pourrait prendre la forme d’une loi pour interdire leur utilisation abusive au sein de l’hémicycle, notamment lors de l’élection des membres du bureau de l’institution. Car l’enjeu, ici, c’est le contrôle du perchoir à travers le poste du président. Mieux, on pourrait aller plus loin, cette loi prendra aussi interdire le phénomène de la transhumance politique au sein de l’hémicycle. Ainsi, un député élu sur une liste doit, durant toute la mandature, rester fidèle à ses convictions de départ. A défaut, il sera remplacé par son suppléant purement et simplement.